Dans le 6e numéro du magazine trilingue PoeticAfrica, Elizabeth Akunyili s’assoit un instant avec Eloga Arsène pour parler de sa vie et de son métier. Veuillez profiter de la conversation et n’oubliez pas de laisser un commentaire dans la zone de commentaire au bas de la page. Merci.
Q1. Salut Eloga Arsène. Je suis ravie de faire ta connaissance. J’aime bien les noms traditionnels. Dis-moi, que signifie ton nom?
Salut à vous Poetic Africa, si c’est une concurrence je suis plus que ravi de faire votre connaissance. Non, je rigole ! Par contre, je suis très sérieux à l’idée de m’exprimer c’est super ! Très honoré. Je vais pleurer après.
ELOGA veut dire « jeune homme ». Je vais vous faire une confidence que peu de personnes qui me côtoient dans l’univers professionnel ont connaissance avant peut être de voir une pièce d’identité qui m’appartient. Mon premier nom est MBOG qui veut dire « le monde » mais je le garde jalousement car il n’y a que les élites qui m’appellent ainsi.
Je porte le nom de ma grand-mère maternelle MBOG et celui de son époux qui est mon grand-père ELOGA, donc littéralement je suis un jeune homme dans le monde. Cette traduction influence toute ma personne, ma personnalité et même mon écriture, car le jeune homme dans le monde est venu marquer son temps.
Q2. Merci beaucoup pour le partage. C’est un réel plaisir pour nous de t’avoir dans cette édition de Poetic Africa.
Si pour vous, c’est un réel plaisir de m’avoir, imaginez l’état dans lequel je suis ? C’est Poetic Africa !!!!!!
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Q3. J’ai parcouru ton blog et c’était une nouvelle expérience pour moi de voir un blog complètement en français. J’ai dû me servir de la traduction en ligne et j’espère que cela a fait justice à la traduction. Je remercie Nnane pour m’avoir aidé.
Malheureusement pour moi durant tout mon cursus scolaire et académique, j’aurais dû ne pas blaguer avec l’anglais et ne pas boycotter en douce ses cours, je regrette ? Non ! [Rire]
Ce qui est formidable dans cette histoire de site littéraire car pour moi, j’aime le dire ainsi, c’est que le projet je l’ai dans ma tête et j’y travaille depuis 2018. A cet effet, certains contenus retenus dans des sous rubriques de poésie en Puéril et en nouvelle, Envol, existent depuis la création. Déjà je tiens à remercier mon oncle Joe Franck qui m’en a fait voir de toutes les couleurs pour m’expliquer les choses pour que je puisse les comprendre année après année. Sans oublier mes amis et amies, en particulier Doualla Sandy ma traductrice comme j’aime l’appeler. Celle qui traduit et corrige chacun de mes textes par amour de ce que je fais et tous ceux qui ont pu participer de près ou de loin et qui d’ailleurs continuent de le faire et de m’encourager, la liste est longue. Il faudrait mentionner que j’ai lancé le projet en ligne en janvier de cette année.
«Leveil2Lecoute» vu qu’il s’agit de lui c’est des affiches de motivation avec des pensées ou brins de poésie, ce sont des articles de société avec mon expression personnelle, des poèmes et nouvelles, des lettres satiriques adressées à l’opinion publique, sans oublier un podcast.
L’objectif, ne pas s’arrêter à la compréhension de la langue française mais se faire lire et comprendre même par les autres. Merci déjà à vous pour vos lectures et écoutes.
Q4. Alors, qu’est-ce qui inspire ton écriture Eloga?
Comme je le dis de manière banale, c’est vous qui m’inspirez. Par vous je veux dire l’être humain, son vécu et mes différentes expériences. Je peux être à une veillée mortuaire et je rentre de là avec une histoire qui ne frôle même pas la mort. Ça me fait penser que j’ai une histoire à écrire qui m’a été inspirée par une dame qui amusait la galerie, lors d’une veillée mortuaire où j’étais il y a peu : l’histoire de Django de fang Ngono.
Vous pleurez, j’écris ; vous riez, j’écris : alors ne vous empêchez pas de vivre.
Q5. Étant un écrivain, as-tu déjà été en manque d’inspiration ou as-tu vécu le syndrome de la page blanche qui a duré pendant des mois?
Non, désolé je ne connais pas. La vie m’inspire et l’inspiration ne vient pas de moi. Et aucunement elle ne dépend de moi.
Q6. Cela veut dire que tu es un écrivain chanceux.
Je dirais plutôt que je suis un écrivain paresseux. Ils ne manquent pas, les sujets sur lesquels je devrais écrire ou encore moins les moyens pour les aborder. Mais est ce que ELOGA va alors se concentrer et cesser de paresser ? Je ne sais pas.
Q7. Quand as-tu découvert le don d’être écrivain?
Don ! Je ne sais pas. C’est certainement en classe de 3e que je découvre que j’aime écrire. Néanmoins, je n’en ai véritablement jamais pris conscience.
Dans ma famille l’art est partout, et très jeune, même si je le suis toujours je me disais certainement j’ai aussi une dose d’art en moi. Je cherchais à savoir ce qu’il en était. En primaire, je dessinais en me disant que comme les jeunes de mon époque j’avais un réel talent pour le dessin mais le verdict était zéro macabo (expression locale qui marque la nullité). Par la suite, je chantais mais là encore ça ne donnait rien, encore moins la danse qui même aujourd’hui n’est pas mon fort.
J’avais oublié que j’ai grandi entouré de livres. Mon grand-père ancien magistrat de profession avait des livres de droit et des encyclopédies partout dans la maison. Quant à ma grand-mère, ancienne employée de la banque centrale de ma sous-région, elle avait des livres d’économie et de gestion partout. Ma mère, elle qui aimait bien la cuisine et l’informatique avait aussi son mot à dire, son grand frère ne dérogeait pas à la règle avec des livres maritimes, sa petite sœur avec les romans à l’eau de rose et son petit frère avec des livres d’infographie. Sans oublier ma grande sœur qui s’intéressait à la procréation.
Tout le monde lisait chez nous sauf Eloga. Mon amour pour l’écriture je le découvre en classe de 3e car je me rends compte que mes poèmes sont très appréciés de mon entourage scolaire. C’est dans cette même classe que ma grand-mère avait découvert et lu mon cahier de poèmes. J’ai bien fait de le lui reprendre immédiatement car elle pensait que c’était pour un devoir de français. Dans mon cœur j’étais super fière, elle avait validé la chose car elle n’était pas bête, elle avait compris.
Q8. Si tu pouvais remonter le temps et rentrer dans le passé, que penses-tu pouvoir changer étant un jeune écrivain?
Rien du tout. Pourquoi voudrais-je changer quoi que ce soit, j’aime le passé qui est fait des jours sombres et joyeux : c’est la beauté de la vie.
Q9. Parlons de tes livres. D’abord, toutes mes félicitations car ce n’est pas facile d’écrire ni de se faire édité. J’espère bien que tu penses à la traduction de tes œuvres comme l’une de tes stratégies pour le marketing.
Vous lisez dans mes pensées en ce qui concerne la traduction de mes livres mais avant il faudrait que je sois édité.
J’espère qu’après m’avoir lu dans cette interview je le serai.
Mais plus sérieusement, je jugeais que par le passé je n’étais pas prêt à être édité même si j’ai été approché sans chercher. Cette année, c’est l’année où il faut sortir tous ces manuscrits : romans, recueil de poèmes et de nouvelles. Je suis prêt, je veux le faire et je sais que ça se réalisera. En faisant une pierre deux coups je traduirai aussi mes écrits.
Depuis le début de cette année, tout le monde qui apprend que je suis écrivain me parle de publier un livre ; alors je le sors cette année mais pas seul, je vous attends car j’ai besoin de vous pour le faire.
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Q10. Qu’est-ce qui a inspiré la publication de ton poème, Espoir?
Ma vie. Dans presque tous mes poèmes je laisse ma propre humanité la plupart du temps. Ma vie n’est faite que d’espoir, car même si quand je poétise on a tendance à croire que j’exprime de la mélancolie, par contre on se retrouve très vite à la fin avec de l’espérance. Pourquoi espoir ? Parce que nous jeunes africains nous avons besoin de rêver. Comment donc rêver ou prétendre accomplir ses rêves, si autour de nous on est frappé par la famine, le manque d’eau potable ou encore plusieurs maux qui minent notre société. Seul l’espoir garde notre bateau stable sans le faire couler sous l’eau.
Alors, quand j’écrivais ce poème je pensais à nous. Nous tous qui devons travailler dur pour accomplir nos rêves, nous qui devons-nous battre dix fois plus car la vie ne nous sourit pas toujours, nous tous jeunes Africains parce que le changement passe par nous : la vraie jeunesse de l’Afrique.
Q11. Qu’est-ce qui t’inspire le plus étant un poète?
Les émotions ! Qu’est-ce qu’un être humain sans émotion ? Si je ne suis pas traversé par de fortes émotions, alors ne comptez pas sur moi pour poétiser. Il faudrait qu’après avoir lu ou écouté du ELOGA, vous soyez transpercé et que votre humanité se manifeste ; sinon je préfère encore dormir et ne pas écrire.
Q12. C’est vraiment génial de s’exercer en poésie et en nouvelle. Comment te sens-tu par rapport à cela ? Tu connais bien ce sentiment d’être présenté et ton profil est riche des publications littéraires.
Je vais certainement vous surprendre car avant la nouvelle c’est dans le roman que je me suis exercé. La preuve j’ai trois manuscrits de roman prêt à être édités.
Si je revenais à la question posée, je suis toujours en quête de nouvelles expériences surtout en ce qui concerne l’écriture. Cette année j’ai même écrit le scénario d’un court métrage qui est en fin de tournage.
Pour la nouvelle, c’était pour participer à un concours que je me suis lancé. Je n’ai certes pas gagné le concours mais j’ai gagné le cœur des lecteurs qui n’ont pas manqué de me le faire savoir.
Mon premier roman c’était un coup de tête. Je me suis assis, j’ai posé le titre, j’ai écrit et j’ai éteint l’ordinateur quand je me suis fatigué : rien n’était prévu.
Je suis tellement fière d’essayer presque tout, d’apprendre et de me former suivant mon amour et les codes littéraires. Très content de savoir que mon profil soit perçu comme étant riche de publications littéraires car je ne veux qu’une seule chose : écrire.
Q13. Penses-tu que l’écriture peut changer l’Afrique (la politique et la culture)? Si oui, comment?
Evidemment ! Mais avant arrêtons d’abord de dire que les africains ne lisent pas. Pas assez peut-être, mais ils lisent, surtout si le contenu les intéresse. C’est toujours un grand plaisir, une victoire et une réelle reconnaissance qu’une personne me dise en confidence qu’elle n’aime pas lire, mais apprécie mes écrits et me cite d’autres jeunes écrivains.
C’est à nous écrivains que revient la lourde tâche d’arrêter d’écrire juste sur le beau et de nous concentrer sur l’éthique, tout en clarifiant les choses sans crainte de prendre position sur les affaires de la citée comme l’ont fait beaucoup avant nous. Tout le monde à son rôle à jouer pour le changement, alors écrivons pour dénoncer, éduquer et instruire.
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Q14. Si tu avais la possibilité de changer la littérature et l’écriture en Afrique, qu’est-ce a cela pourrait être?
Je demanderais déjà que les écrivains écrivent sur les choses qui concernent l’Afrique et les Africains. L’époque où on écrivait sur le coq qui chante et le jour qui paraît doit être révolue. Un véritable système en place doit être mis sur pieds pour la littérature et l’écriture en Afrique. Etre écrivain doit être un métier, non pas seulement pour l’amour propre mais aussi que cela soit pris au sérieux de tous et par tous. Que les écrivains se mettent ensemble, sans trop rêver qu’ils n’oublient pas le monde extérieur qui les attend.
Q15. Enfin, que gagnes-tu en écrivant ? Partage l’expérience de tes bénéfices obtenus en écrivant pour inspirer ceux qui aimeraient se lancer dans l’écriture.
Déjà, j’aime écrire. Donc, en écrivant je me fais d’abord du bien, mais par la suite mon bénéfice est plus immatériel que matériel. Inspirer les autres par les écrits, arrivez à changer la pensée des autres, les donner de l’espoir, les permettre de croire ou de réaliser leur rêve, qu’y a-t-il de plus beau ? Non.
Si vous souhaitez écrire, et que vous sentez que, plus qu’un besoin vous êtes fait pour cela, alors n’attendez pas que le jour se lève ou se couche ; encore moins n’attendez pas l’approbation de qui que ce soit : faites le tout simplement.
Ecrivez car vous aimez cela. Écrivez pour partager ce que vous ressentez. Écrivez car vous avez tant à dire. Écrivez aussi pour soulager les autres et les apporter du réconfort : écrivez car cela fait partie de vous.
C’était un réel plaisir pour moi d’entretenir cette conversation avec toi. Merci beaucoup Eloga.
C’est moi qui vous remercie de cette opportunité.
This chat was published in the 6th Issue of PoeticAfrica magazine.
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